Hommages à Nzongo Soul, par le docteur Denis Samba-dia Malumba- Mpombo (We na makutu ka wa !)
Nzongo…Soul
Mbote, bonjour, Tata Nzongo-Soul !
Le village est triste. Une très chère de nos étincelles s’est
éteinte.
Nzongo-Soul ou la maison de la panthère(1)
.
Lorsqu’au terme de son chemin, on se sera longtemps calé, voire totalement collé à
son totem, au point de s’y identifier, alors bien chez nous, on dit : « Mwana Ngo Putulu,
lugonia = Quel bonheur ! »
Par le biais de notre rituel d’Adieu Kongo du « Kivuandu, dizi », nous sommes, quasi
d’instinct venus ici, (tu sidi nanguka, telama) tel un seul homme, nous asseoir près de toi : te
parler - converser avec toi… t’accompagner, toi qui présentement auras consommé ou vidé
de l’intérieur la dernière goutte de ta vie humaine.
Tu vois : « Tu sidi natuka, Tuizidi !» nous sommes tous venus ! Nous voici à présent
autour de toi ! C’est à jamais le moment, à notre tour, comme jadis ou hier encore (mazono
kwa) tu le fis toi-même(2)
, de te dire Au-revoir, "yenda", Au revoir, "yenda kia mbote" : drôle
de dernier salut imbibé de larmes, l’esprit lourd de tristesse !
Pourtant, à peine hier (zono) – destin à force d’âge encore bien vigoureux "ni
kilikiti", te voilà pris, arraché, branche verte ou promesse coupée nette ; bien à notre regret
« Wele wa n’kundzu » ! A l’appel, volontiers tu es bien parti. Aussi, pour nous, tu es allé
vivant, pas mort mais simplement tu t’es transformé et devenu invisible(3)
telle une
chrysalide (kimpati) en réalité chenille mutant en papillon. Si pour toi qui voyages, ta pirogue
cap sur la mythique rivière-frontière séparant les eaux de la vie de celles de la mort ; tu pars,
fier, le pas pressé (na mawasu), le cœur léger (ntima kani ngongo), vers les "bitsinda", ce
village-lumière des ancêtres (gâta dia ba nkulu, ba nkàaka diena ntsamina ni pululu, ni
fuobombo). Mais pour nous qui restons, face au vide et fort plongés voire enlisés dans la
douleur et la tristesse car la mort, toujours arrachement, coupure, trou, nous parait toujours
désagréable voire scandaleuse. En ton temps, tu fus un curieux gourmand du savoir caché,
intrépide et insatiable fouineur, homme de terrain, des rares lieux, où l’on n’a peu ou jamais
été. Et, à ton retour, les bras chargés de collectes et de résultats, à la manière d’une
panthère-mère revenant de chasse pour les siens, tu te révélais un noble fils addict des liens
humains « wa ba na zola », un infatigable rassembleur « na zola, luwu lwa mvukisa, zonzeka
1
: Panthère : « Ngo », animal totem Kongo. Les chefs Kongo en portent habit, chapeau, peau sur
eux, également arborent à leurs pieds la peau de panthère. Mieux, ils se couvrent de
« mvunga dia Ngo » couverture tachetée de rouge et noir vifs.
2
: cf. sa chanson écrite lors du décès de Papa Wemba.
3
: vie – mort : « Nitu kwa yi fwa, ka lundji’a ko » = « Seul meurt le corps, pas l’esprit », croit le
Mukongo.
2
niakisa bantu » ; bref non seulement un (ré-)enchanteur des mondes anciens, perdus, mais
également un rêveur-debout du monde d’aujourd’hui et de demain (mia lumbu ki, na
mikwiza mbazi).
De tout cela, Nzongo Soul l’aura été !
Je ne doute pas un instant, bien que très ému, ni n’ai de cesse de me surprendre en
train d’évoquer(4)
, faire revivre Nzongo Soul, de puiser dans nos encore chauds souvenirs,
ceux-là mêmes palpitants, croustillants et marquants, vécus de concert avec lui. Comment,
hormis son œuvre de qualité, tirer mon Nzongo Soul, du trou de l’oubli ? Quelques lignes en
guise de traces ici suffisent-elles ? Comment enfin, à travers mes multiples souvenirs de lui,
en faire une figure unie et rassemblée ? Disons autrement les choses. Aujourd’hui, dans ce
pur travail certes de reconstruction, je cherche encore. J’essaie surtout de tenter de saisir et
comprendre, voire dégager ce « kima », ce je-ne-sais-quoi d’attachant, d’individualisant chez
lui, et qui faisait que – congolais parmi les congolais, mukongo parmi les siens, artiste
musicien parmi les artistes ; bref pur africain et simple humain parmi ceux-ci – Nzongo Soul,
d’entre eux tous, fut un Nzongo Soul, c’est-à-dire un être unique, particulier, singulier (« wù,
telamane, batele : ni tata Nzongo Soul ! »)
Lors du récent décès de Papa Wemba, Nzongo Soul lui-même, en guise d’adieu à
son immense et hors-norme aîné (nkulutu, yaya), lui dédia une chanson. Celle-ci encore à
l’état d’ébauche, le prétexte, là, s’y prêta pour m’inviter à sa généreuse table. Après un
copieux repas et conversation tenante, il prît sa guitare, en gratta quelques cordes, l’accorda
et s’exécuta aussitôt. Puis, les yeux humides, il revient vers moi et me demanda, à moi qui
étais non musicien, humblement mon avis. Partager sa musique avec des personnes aimées,
tel reste le rêve de tout musicien !
« Yenda eh … eh ….Yenda eh
Eh Yenda eh… eh yenda eh ! »
(5)
Pour moi, le rayonnant génie de Nzongo Soul éclate puis s’étale explicitement ici. Il
me replonge instantanément et directement dans mon enfance au village ; jaillissement d’un
univers mien onirique, ludo-magique, de surcroît quasi mythique et, ma foi, de toute part
balayé par de l’imaginaire merveilleux voire féérique. Avançons et touchons du doigt les
choses.
Rappelons et dressons la scène.
4
: Evoquer : me remémorer de lui, de son sourire, de son regard, d’un geste, de son intonation de
voix. Ex. son appel (mbila) sur scène des Hommes et Femmes : « Babakal’eh ! Bakento’ eh ! »
5
: « Vas, oui… oui…. Vas-y, oui
Vas-y, oui … oui, vas-y, oui ! »
3
Voici deux enfants fortement liés par une amitié de longue date : « kindiku kia bola.
Ba tomo zolosono, niba sakana kwau ba bole », véritables indécrottables camarades de jeux,
mais qui sont de deux villages différents, malheureusement tantôt séparés de rivière(s),
forêt(s) et tantôt parfois de cimetières(6)
. Ils se donnent alors, fréquemment à tour de rôle,
rendez-vous, dans l’un de ces villages. Ils s’y installent et se mettent enfin à s’amuser
(sakana). Ils se livrent à leurs habituels jeux favoris (mooka, tsaka, bitsamu, bimpa, ngualo,
etc) ; bref ils s’enivrent de longues, succulentes et bien tardives causeries (bimoko), jusqu’à
parfois la nuit tombante, oubliant le temps…
Au lourd et tendu moment de séparation, instant angoissant, pénible et cruel où
l’un viendrait réciproquement à manquer à l’autre, celui qui reste, gardien du village, à
défaut de reconduire son ami (ndiku) à domicile, question de l’accompagner du regard et de
la voix(7)
, dit ou plutôt chante à cet autre qui s’en va, s’éloigne :
« Eh Eh Eh yenda eeeh »
(8)
Et l’interpelé, celui qui, progressivement sur le chemin, s’éloigne, lui renvoie à son
tour le propos suivant :
« Eh Eh Eh sala eeeh »
(9)
Tandis que les deux enfants, devant la coupure, l’inconnu, en train de se dessiner et
l’affrontant, s’intiment mutuellement mouvement et courage, avouons qu’ici s’opère en deçà
de la question de la perte ou l’éloignement de l’autre, un réel travail de détachementattachement.
En tout cas, aussi futiles et anecdotiques que paraissent ces activités ludiques
infantiles, elles révèlent toutes quelque chose de bien plus profond. Pour preuve, Nzongo Soul
y a puisé son inspiration, s’en est nourri ; bref, de là, il s’en est allé plus loin, y ajoutant tout
simplement, à notre avis, une charge symbolique. Il a (re)découvert ainsi sa tradition, et quoi
d’étonnant alors qu’il y a fortement tracé et creusé son sillon.
6
: cimetière : lieu de rencontre entre vivants et morts, suscitant des peurs infantiles.
7
: Apparaissant et disparaissant jusqu’à ce que l’écho de la voix (mulolo), et la silhouette de la
personne (kintsinsia) s’anéantissent d’eux-mêmes (kota.. duka, nkàla mupepe na tee, buwu
zibakana).
8
: « Oui, oui, oui, vas-y, vas-y au loin. Prends bien soin de toi. »
9
: « Oui, oui, oui, reste. Fais bien attention à toi. »
4
Une figure s’efface et – paradoxalement à partir de ce trou, cassure faite de manque
et de trace(10)
; bref de vide dynamique – une autre émerge, étrange image revitalisée. Mieux,
la tradition africaine reconnaît à l’évidence la naissance d’un enfant comme un ancêtre qui
revient.
De ce fait, ma rencontre « bwabanu’ani » avec Nzongo Soul fut à la fois simple et des
plus extraordinaires. Au départ, deux personnes là, et bientôt plusieurs, à chaque fois se
rencontrent, circulent, échangent, fécondent et s’auto-fécondent. Il y a du gain et du lien. L’un
se nourrit de l’autre. Tôt, cette relation devait vite s’avérer – après de multiples et mutuels
défrichages de terrain, semis et germination (autofécondation) – finalement porteuse de
fruits. Pensant rencontrer un frère, je me suis trouvé un ami, un "Faustin ma ndiku". En fait,
bien au-delà également d’un musicien-artiste, d’un « kikolo kia mbazi, kissiki kia ngoma na
tsambi », je suis tombé réellement sur un vrai philosophe MuKongo à l’accoutrement
éclectique, négligemment entretenu, tignasse aux tresses rasta, apparemment rebelle à tout
passage de peigne ; bref, le visage ridé voire raviné sous le poids de ses nombreuses
interrogations ; mais l’esprit toujours vif, avec en main quelques outils et une ferme
détermination de ne jamais lâcher chemin et d’aboutir(11)
. En tout cas, dans notre
« bwabanu », parmi les mille et une merveilles, je ne sais ce qui nous liait tant ainsi ! Cette
chose, propriété-même des Ancêtres, n’était, à la vérité, pas production nous appartenant, ni
à lui, ni à moi, simples passeurs que nous étions. « Kà bia me ko, kà bia nge ko, bia ba nga ! »
aimait-il répéter. Et d’ajouter aussi : « Kia me, kia me, kia nga, kia me ko ! ». Cela en réalité
relève de notre Culte des Ancêtres « Kikulu Kieto ». La transmission, le relai ici d’évidence
s’imposent. On comprend aisément et d’emblée que notre commun terrain d’entente et de
recherche fut notre kikulu à travers la langue ou zu-dinga. Nous tenions là désormais ce lienvoie(x)(12)
, fascinante ficelle (singa) reliant deux bouts : vivant/mort, mortel/immortel,
visible/invisible.
En effet, lorsque les civilisations s’écroulent et disparaissent, ce que les sages (Mbuta
= vieux) emportent de plus précieux avec eux, bien loin du matériel, de l’argent et de tout
autre objet, c’est la langue et précisément ils enfouissent (zika) ce bien dans la profondicité
de celle-ci, mu moyo zu. A nous, êtres vivants parlants, d’aller auprès de l’ancêtre la déterrer
(zula), afin d’en égrener (songona) les mots, la direction, le sens. En effet, seuls les morts,
l’ancêtre détiennent, soutiennent la langue, en ont le secret.
Maintenant, faisons une large place au grand musicien-artiste philosophe, Nzongo
Soul. A l’instar de ses cafés musico-philosophiques qu’il aimait souvent animer, d’autres
chantiers ainsi en activité ou à peine ouverts, sont restés sans lui en état. A nous de les ouvrir
de nouveau, les prolonger ! Lui, en véritable criquet-indicateur ("Mutsongui songela nzila"), a,
10 : Pensons, si ce n’est au souvenir, à cette représentation "creux/présence" ; du moins à la
chaussure de Cendrillon cherchant son pied et finalement son prince. Bizarres épousailles !
11 : S’asseoir et être porté par sa tradition et la transmission.
12 : Zu : la langue, se dit aussi « dinga = cherche-moi », mais tu ne me trouveras pas. Ici, s’ouvre,
même en dépit de sa mise en défi, une voie, un chemin (« nzila »).
5
pour sa part, déjà débroussaillé une partie du terrain. Il a su dégager et distinguer trois sortes
de Paroles :
- La Parole parlée, discutée ou « zonza », celle-là même, sous l’arbre à palabres(13)
de la place du village, qui« zonze ou zonzika » assemble, met en tas ; bref
rassemble ce qui paraît épars, morcelé, parcellaire, émietté.
- La Parole dite chantée ou « tanga », elle, en même temps lecture du monde, en
est également son enchantement, émerveillement sur fond pédagogique. Cette
parole, par le biais des nkunga (chants), prélève et met en exergue les traits et
caractères de l’imaginaire collectif pour en camper ou dresser un portrait. Ainsi,
l’on grossira certains traits des personnages qu’on chantera sur la place
publique14
. Cette parole peut être finalement aussi adresse, appel, prière à
l’ancêtre, au Nzambi’a Mpungu (Dieu).
- La Parole dite dansée ou « kina », elle survient souvent après un lourd conflit et
débat bref à l’issue d’un laborieux commun accord, selon la règle (Làa, nibuna). Il
s’agit ici de toucher, désormais harmonie régnante par la musique, le corps de
l’ancêtre pour lui rendre son culte et l’amuser ; en quelque sorte, lui faire gligli,
ce paisible sentiment d’après démangeaison (miaka).
Pressons le pas, il se fait tard. Avançons avec Nzongo Soul et allons plus loin.
Jetons enfin une dernière fine fleur à Nzongo Soul. De sa forge, est sortie en effet son
plus beau bijou : le Wala(15)
. Ce concept se veut, dans son esprit, un pur concentré de sa
philosophie. Le Wala convoque plusieurs univers. Mais avant, désossons étymologiquement
ce mot. "Wa" signifie Ecoute ; "La" fait appel à la règle, la voie(x). Ce qui revient à dire : Ecoutes
13 : Il s’agit et c’est vital de parler, de se parler. Les gens et même les pays qui ne se parlent pas
entrent en conflit et se font la guerre.
14 : Exemples de chansons :
a - « Ehé Dio, na wa mona mwana mpelo ?
Ehé Dio, mwana mpelo wa na mweni ku Brusseaux… »
Traduction : « D’aucuns défient et cherchent à rencontrer un enfant de prêtre, curé ! – Quant à
moi, j’atteste, je témoigne, je l’ai vu de mes propres yeux à Brusseaux (Ngoma biyelo) »
(Ba Mpelo ba kuela ka ko. Boka ba ma mères ba tsie ?)
b - « Ma Lukula wa labidi nkombo (bis)
Eh nkombo ma Lukul.. (bis) »
Légende et traduction : « Pour accueillir son gendre, Madame Lukula aurait volé un cabri. Et
l’assistance de répondre en cœur, Oui, ce cabri de madame Lukula, stigmatisant ainsi le vol,
l’objet du vol, surtout de la part d’une femme. »
c - « Ehé Dio, meno bene ni bo ni bwana. Yirika ! (bis) »
Traduction : « Moi-même je serai ainsi. Fais-le bien. (S’agissant d’un décès ou d’un sort réservé
à tous, au commun des mortels.) »
15 : Wala mvula (pluie) : Rituel, lors d’une veillée funèbre ou d’un grand évènement, qui empêche,
endigue, chasse la pluie.
Wala Bwa : Rituel qui consiste, le chien s’écartant du flair ou de la piste du gibier, à le faire
revenir sur le droit chemin. On rappelle, fait revenir le chien perdu après un coup de feu, qui
signifie ratage du gibier lors de la chasse en criant : « Massu, massu, massu ! »
6
et Comprends la règle de la voix, de la parole : le "Bukieleka
(16)
", la Vérité qui est Mpemba
(blanc, lumière) et son opposé le "Bungungu(17)
", le Mensonge qui est, lui, Kala (charbon noir,
fausseté = luvunu, mapia, poya, niamba) ; d’où le Ta kala ou Ta Mpemba(18)
. Sache distinguer
en toute circonstance le vrai du faux. Alors chante-le et proclame-le : « E wala eh eh mam’ee »
( cf. sa chanson "Wala").
A l’inverse, avec le "bungungu", c’est plutôt l’interdit (mulongo, kikandu) : « ku
nsàandibo = Ne fais, n’agis pas ainsi ! » (cf. sa chanson "Ku nsàandibo"). En revanche, bien audelà
de l’écoute (WA), et si tu arrives à réaliser, concrétiser (SA) et traduire finalement en acte
(yidika) ton écoute ou ce que tu auras écouté, survient alors le WASA, c’est-à-dire le guérir.
Par ailleurs, Nzongo Soul, ne manquait pas dans sa gibecière, son nkutu, une noix de
kolas (kazu), objet initiateur certes d’échange, mais également censé procurer de l’énergie.
Lorsque manque cette énergie, le Mukongo alors jure et dit : « M’Lembo putu, wa zuka na
zuka ! ». Par son doigt qu’il n’a de cesse d’agiter, le Mukongo se morfond dans ses ratages,
ses insuccès répétés. Il y a comme là combinés, faute de kazu (kani-zu), regrets et nonmaîtrise.
Celui qui ne se voit plus en capacité de l’obtenir, c’est-à-dire le pauvre (putu), punit
paradoxalement son doigt au lieu de s’auto-punir, par ses incessants multiples « si »,
conditionnels de pure intention, parole irréalisable sans acte. Le Kazu, manquant, creuse un
trou. Et comme tout trou, l’important demeure sa bordure (ndeko), ce qui en relève et fait
encore tenir (ni kokoto) les choses : « Lauki ka badamana benga, kola ka simbidi »
(19)
, autre
horizon !
Le lien avec nos Ancêtres, racines plus qu’essentielles et vitales (midza mieto),
s’annonce Exigence et Urgence.
Don d’énergie et manifestation de la parole, lien avec l’Ancêtre, le kazu, objet rituel
tant recherché et si apprécié des vieux (binunu20) et des hommes mûrs, s’invite toujours
également dans tout rituel, cérémonie ou grand évènement d’importance. Son absence, si elle
ne relève d’immaturité, peut signifier dénuement, pauvreté, avec le zuka m’lembo du putu.
En tout cas, avec le yenda et le sala’eh, chacun paradoxalement, tout en se séparant
de l’autre, garde en soi un peu de lui. Le partant pourtant s’en va, disparait. Il voit, sous la
menace de l’éloignement, s’évider, s’anéantir son corps et sa voix dans sa marche progressive
vers l’Ancêtre, le kulu, le kikulu.
16 : loi sacrée Kongo qui ouvre sur le permis (tsamina ni pululu, ni pukudi), la lumière. Il ouvre sur le
"kimuntu", qu’il renforce.
17 : bungungu (mensonge) quant à lui appelle hors humanité, animalité, passage du "kimuntu" au
"kibulu", fausseté (busafu), l’interdit (mulongo) ; bref autant de coupure avec le bukieleka, cette
règle de Droit.
18 : Ta Mpemba, Ta kala : Expression très large qui oblige à (se) dire, (se) donner ou avoir raison ou
tort, à être dans le vrai ou le faux.
19 : Autre horizon : Si un fou accroupi défèque devant un trou, c’est qu’il tient une solide souche.
20 : Binunu : (bi) pluriel de (ki)nunu = vieux. Nuna, v. vieillir, vient de "nuni", être volant ayant maîtrisé
l’espace et l’air, tel le vieux prêt à s’envoler.
7
Désormais, lors de ce retour (Kaala21), arrivé là-bas, il a devoir de manifester et
toucher le vrai Zuka, c’est-à-dire le fondement-même de toute énergie (ningu nza), y compris
celle de la parole, la voix.
C’est vrai, Nzongo Soul est vivant ! Il vient toujours nous parler et nous dire :
« Buyelele (courage) !
Yeela bo yela22 ».
Nous voyons comment du simple jeu d’enfants se révèle une vérité immuable
contenue dans la tradition et que Nzongo Soul a magnifiée en chanson. Cette vérité, à notre
sens, est aussi bien rite d’alliance/séparation que rite funéraire. Depuis toujours (tuka muna
tuka), le yenda et le sala, lient deux parties, qui se donnent mission et obligation. Tant pour
celui qui s’en va que pour celui qui reste, de sa place qu’il occupe désormais, il y a des choses
à faire pour que les choses se remettent à circuler.
Grâce à Nzongo Soul, nous pouvons à présent un peu mieux lire notre tradition.
Dr Denis SAMBA dia Maloumba Mpombo
21 : kaala : suivre le mouvement vers la source de l’énergie, le "ka".
22 : « Courage ! Essaie afin de grandir. ». Propos qui s’adresse à celui qui reste, gardien du village pour
"yela" après moult apprentissages "Mayela". C’est en forgeant qu’on devient forgeron.
Partout où se porte le regard de Theo, il ne voit que morceaux, pièces, lambeaux d'un monde qui se déconstruit. Car en effet, cette pensée unique du monde global qui veut nous faire croire que d'un bout à l'autre de la planète les hommes auraient les mêmes aspirations et les mêmes satisfactions est un leurre...
A travers des textes de réflexion et des pensées constructives, puissions-nous recoller les Nzenga (débris) d'un monde qui ne cesse de s'effriter, par manque de considération et de respect à l'altérité. La dignité humaine est notre passion et le devoir de se souvenir pour transmettre, notre préoccupation: "Nsimu ni mayela", les repères facilitent l'acquisition de la science !
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