« Wuuna kua wu ta
ta ! » Radicalisation ou déterminisme éthique Koongo ?
Tout groupe
d’êtres vivants, végétaux et animaux disposent des codes spécifiques pour
communiquer et entretenir la cohésion ou la survie du groupe. Chez les Bantu,
chaque ethnie composant la mosaïque de ce grand peuple, ses différents groupes
ont leurs incantations, leurs rites, leur langage, leurs us et coutumes qui les
distinguent les uns les autres, tout en gardant aussi les valeurs spécifiques
qui les distinguent d’autres peuples.
Ainsi, les Koongo et particulièrement les
Ladi et les Sundi firent de certains slogans ou des maximes de sagesse
populaire, des codes qui renforçaient en eux la notion de la résistance pour
lutter contre les antivaleurs au sein de leurs communautés, mais surtout en cas
d’agression extérieure afin de demeurer intègres et unis. Tout comme les légendaires
Samouraï du Japon (XI et XIIe s) qui firent du sens de l’honneur le leitmotiv
de leur raison d’Etre : « Mieux vaut la mort que le déshonneur »,
leur fidélité à la loyauté fut la norme de leur existence. Les
« Ngu-Nza » de Koongo dia Ntotela (les porteurs de lumières), formés
et aguerris à travers le kimpasi ou le lemba se devaient d’être probes et
fidèles à certains principes dont la loyauté aux ancêtres, le respect de la
parole donnée, etc. Bref. « Buzitu bua nkieno » (ce qui est dévolu,
la terre promise (kie no) qui ne peut être héritée que grâce à la conformité
aux principes majeurs du lemba : « Buzitu bua nkieno mia Nza (cosmos)
+ Buzitu bua nkieno mia ba mbuta (ancêtres) + Buzitu bua nkieno mia hata
(société). Ce fil harmonique qui consolide l’humanité du Bukoongo bueto
(l’humanisme koongo = Kimuuntu) se décline concrètement en :
Mbelolo+Ntsalulu+Ndiatulu (comportements sociaux+dialogues des œuvres =
témoignage cohérent de vie). C’est la constance dans la praxis (application
quotidienne de ces principes) qui va constituer ce code verbal inoubliable (mot
de passe) de se souvenir de ce qui fut promis depuis le commencement des
luttes, « chose ancestrale, objet étrange » (dirait l’autre) qui
permit aux anciens (Nkaaka) résistants de faire face à l’oppresseur et de lui
tenir tête, ne jamais courber l’échine, ne jamais trahir leurs idéaux. Cette
cohérence constante fut ainsi désignée par ce slogan, hélas usurpé et galvaudé
de nos jours émettant des dissonances
gognitives : « Wuuna kua wu ta ta ! »
« Wuuna kua wu ta ta ! »
entendu concomitamment comme défiance et affirmation. Défiance, dans le sens de
braver l’adversité avec détermination (Tout ce que tu veux dire, dis-le !
En sachant que ce qui doit être dit doit être fait = Ta wa yidika).
Affirmation, car ce qui est dit doit demeurer dans la constante cohérence qui
devient un déterminisme éthique koongo plus qu’autre chose de fantaisiste et de
merveilleux pour noyer le poisson ou abrutir les masses acquises aux coups bas.
Le « Wuuna kua wu ta ta ! »
est un principe de probité, donc éthique, outil de résistance aux antivaleurs
de traitrise et contre la médiocrité, pour demeurer fidèle et vaincre l’oppresseur,
parfaire le travail du développement humain intégral, renforcer la culture des
liens pacifiques inter communautaire, poursuivre inlassablement le travail de
la construction communautaire, refuser catégoriquement l’assimilation
culturelle, la perte d’identité… (Wa dia fua, yika dio). Cri de lutte et non
cri de guerre, car le peuple Koongo est un peuple travailleur et pacificateur
(à travers ses leembe).
Si le Samouraï avait le sabre (Tachi), la
wakizashi (katana), le tanto, etc, pour vaincre l’ennemi, le Ngu-Nza comptait
sur la puissance du verbe (Ta) et sur sa probité morale qui constitue son
« retour sur investissement » auprès des ancêtres et sur Ta-Ma
Mpu-Ngu dont il respectait les « nkieno » pour lui assurer la
victoire et la fécondité de ses œuvres, car « Kisadi ni ki
die » ! (Le serviteur bon et fidèle reçoit toujours sa digne récompense).
La cohérence de sa parole à ses actes lui retournait la victoire, la bénédiction,
comme bénéfice à sa lutte déterminée pour une cause noble de justice sociale
collective. Se sachant en sécurité entre les mains des invaincus :
absents-présents et invulnérables (Ses ancêtres et Ta-Ma Mpu-Ngu), il entrait
farouchement en résistance sans sourcilier contre l’oppresseur. Les héros dont
nous vénérons la mémoire comme Ta Mbiemo, Ma Ngunga, Ta Mundongo, les martyrs
de Trois francs et de tant d’autres résistants
n’y sont arrivé que par l’attachement à ce principe sacralisé de « Wuuna
kua wu ta ta !). le Cardinal
Biayenda accepta le sacrifice suprême plutôt que de sauver sa vie en livrant
son église et le peuple de Dieu qui lui fut confié (Il l’avait dit, il l’a
fait !) : Ne jamais ni trahir ni se trahir (se compromettre ou se
laisser corrompre), se sacrifier plutôt que de sacrifier autrui ; tandis
que les usurpateurs de ce slogan vantent le sang des martyrs en sauvant leur
peau, en préservant leur progéniture tout en livrant les enfants des autres aux
massacres inutiles. wuna kua, Il manque le (Ta)2.
Si le « Wuuna kua wu ta ta »
n’était plus que « Wuna kua ba ta wuna « ? C’est ce qui paraît à
priori, en observant l’usage galvaudé et vulgaire de ce principe sacré et éthique de probité
morale et d’honnêteté politique, entrainant ipso facto des jeunes aux
incivilités, en leur faisant croire qu’ils seraient dans la logique de leurs
ancêtres et des héros qui délivrèrent le pays des mains de ses oppresseurs.
Mysticisme et démagogie ! « Wuna kua ba ta lu wuna, ka wuuna ko wu ba
ta ! (Ba mbuta) ». Le « Wuuna kua wu ta ta ! » est
aussi respect de la parole dite (Ta) par l’homme (Ta), diminutif du père (ta de
taata). C’est l’approbation de la parole qui procède du la paternité, une sorte
de credo incitateur, qui tonifie et rend vigoureux. Nous nous situons ici dans
une société où la parole du père fut sacrée, car probe lui-même et digne de
confiance.
Vidé de son essence, le « Wuuna kua wu
ta ta » devient un slogan creux, ridicule, dévastateur, servant à faire
faire du zèle aux fanatiques pour promouvoir la radicalisation dans les
broutilles et la buzoberie en puissance. On ne peut pas tromper indéfiniment
sans se ressaisir, bon sang ! On ne devrait plus se laisser éblouir par
des sornettes qui font des koongo un peuple risible, comme si « Wuuna kua
wu ta ta ! » se résumerait à s’entêter de marcher sur les chemins
scabreux qui mènent à l’autodestruction (lufuuku). « Ntsimu ni
mayela », comme le dirait Saint Augustin dans son livre X des
confessions : « la mémoire est l’estomac de l’âme » et
l’âme Koongo se nourrie de « la mémoire cosmique de ses aïeux »
(dixit Maître Rudy MBEMBA –Dia-BÔ BENAZO MBANZULU, père du muntuisme).
Lorsqu’un code est usurpé, il faut en
reprogrammer un autre sur les bases de ses fondamentaux. « Les
diables-noirs », les marchés Total, Bourreau et Commission nous ont trop habitués
à des devises incongrues et vulgaires qu’il nous incombe à réhabiliter le sens
de l’honneur et la restauration du Kimuuntu à travers les véhicules d’autres
codes que ceux, désuets et avilis par des usurpateurs et des saboteurs du
patrimoine immatériel Koongo qui tronquent l’illustre mémoire des anciens. Avec
le numérique et les générations ITEC, il nous appartient d’initier des moyens
efficients de vulgarisation, plutôt que
la vulgarité et les bassesses qui prolifèrent à travers les réseaux
sociaux, à travers des balivernes insoutenables. Les enjeux sont considérables
aux « Ngu-Nza » du XXI e siècle et aux « Leembe » de
contribuer à la levée de ce matin d’or tant recherché et tant attendu, car les
« Ngu-Nza » sont des témoins de l’aurore et non de l’horreur !
Que nous reste t-il de ce qui fit autrefois
la fierté et la dignité d’un peuple mythique ? « Ni wuna kua, Wu ba
wuna, we na meso » ?
Puisse cette crise lugubre qui ne fait que
trop durer dans la nuit noire, nous inspirer et nous servir de terreau propice
à la restauration ?
THAUKO.COM, Un Monde Juste-Humain !
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