vendredi 27 octobre 2017

Le Leemba et la transformation de l'Etre ou du Muuntu : Une majestueuse contribution de Taata Nduenga, présentée par THAUKO.COM


A une époque où les replis identitaires refont surface plus que jamais, à cause de l'égocentrisme des uns repoussant les autres dans leur retranchement, subissant  frustrations et humiliations  à cause de l'exclusion de ces derniers, renforçant en eux le sentiment de marginalisation... chacun se braque, se détournant d'un avenir commun illisible où le flou s'est emparé de toute perspective de l'épanouissement du Muuntu. Alors, on tourne le dos à l'avenir, saisissant les " kaléidoscopes" du passé, on tente désespérément de "zoomer" sur quoi s'accrocher dans un monde où la montée fulgurante des égoïsmes ravale l'espérance; comme l'illustrent si bien les propos du professeur Henri CANAL, à travers sa préface de l'édifiant ouvrage de l'éminent koongologue maître Rudy Mbemba-Dya-Bô-Benazo-Mbanzulu, intitulé: "Le Lemba ou l'ordre initiatique de Koôngo Dya Leemba", page n°7: " Le sens de chaque futur, des individus ou des sociétés, en effet, est à prendre dans les traditions les plus lointaines, trop souvent ignorées ou méprisées par goût d'un prestige uniquement superficiel, artificiel, creux." (cf. éditions des écrivains).
   C'est ainsi que bien des gens de ma génération ont fait le choix d'un retour légitime au passé "Kikulu". Hélas, beaucoup s'y égarent dans l'interprétation mystique d'un passé fantastique avec leurs fantasmes d'illuminés ! Fabriquant ainsi des gourous et des vendeurs de mirages qui leur fait miroiter des miracles à tout bout de champ, loin de la connaissances des fondamentaux, parmi lesquels: Luzabu na buzitu bua  kieno ou nsieno (ce qui vous appartient et ce à quoi vous êtes tenu à obéïr, la Maama Ntoto, Ma Kisansi. Cette imprégnation normative donne ainsi la possession de la terre et tout ce qu'elle contient), comme le précise Celui qui a dit: "Heureux les "leembe" (les doux), car ils possèderont de la terre". Les lois du Leemba font partie des lois cosmiques, comme énoncé dans la béatitude citées ci-dessus. Car "Les préoccupations fondamentales de tous les humains, de tous les êtres pensants de la lumière de toutes les époques et de tous les temps se trouvent au fond des initiations et au fond des psychanalyses, des hiérophanies et des psychosomatiques. Notre planète, en particulier, ne sera sauvée par l'illusion, le baratin politique, le gaspillage, les mensonges ou les distractions." (cf. Le Leemba ou l'ordre initiatique de Koôngo Dya Leemba, p. 9). Le Leemba considéré comme un mystère "mia ku leemba ka mi tewo ko" est exploité à dessein par des gens sans vergogne qui profitent de l'ignorance des autres, pour s'affirmer en être maître et qui, au lieu de façonner l'Humain à la sublimation et à l'excellence l’entraîne dans des marécages boueux et nauséabonds d'une interprétation biaisé de ce qu'est cette illustre école initiatique de l'homme accompli, de la personne sublimée tendant à sa divinisation (bunzambi), c'est pour cela que les anciens disaient sans doute: "bu wena na taata haanda lemba"! car tout serait désormais soumis au "leembe", tant son rapport au cosmos, aux ancêtres et à la société ne souffrirait d'aucune faille. "C'est ici que, le Leemba, à l'instar de Koôngo dya Kimpassi, sert d'instrument d'éducation, de formation et donc de socialisation de l'être ou du Muuntu. Le Leemba est, entre autres, la voie du salut, celle qui permet d'ordonner en tous points de vue l'être ou le muuntu notamment dans sa dimension expressive. Le Leembe ou l'initié de Leemba est travailleur et, à ce propos, son langage doit être ordonné, clairement explicatif, organisationnel et constructif. Ainsi, initié de Kimpasi ou de Leemba, le roi du Koongo est détenteur de Zuu ou langage (se distinguant nettement de la parole ou ndinga) avec lequel il parvient à comprendre, saisir et traduire les mystères du Nza ou de l'univers pour son bien-être et celui de son royaume." (cf. Idem, p.19).
   Laissons la paroles à taata Ndwenga qui vient nous édifier à travers ce sujet choisi pour éclairer notre lanterne sur Le Leemba:                                                                                                                       LE LEEMBA ET LA TRANSFORMATION DE L’ÊTRE OU DU MUUNTU


LE LEEMBA est une école, une des plus anciennes écoles de formation de l’Etre chez les Koôngo. C’est une haute institution directement héritée des pères fondateurs de Koôngo Dya Ntootela.

Autrefois, chez les Koôngo l’éducation des enfants quel que soit leur sexe incombait, à la mère jusqu’à l’âge de cinq (5) ans. Dès l’âge de cinq ans intervenait un système éducationnel tenant compte du sexe des enfants. Autrement dit, à la cinquième année, s’opèrait une sorte de “séparation” tendant en un suivi éducatif du jeune garçon par les hommes autour du Mboongi et celui de la fille par les femmes.

Si le Mboongi est, sans doute une institution fondamentale d’éducation et de formation du jeune garcon, le LEEMBA, apparaît pour lui comme une espérance sociale  d’accession à une vie d’adulte plus structurée.

C’est ainsi que le LEEMBA est définie comme une haute institution d’initiation de l’Etre ou du MUUNTU, c’est-à-dire une école de formation et de transmission des savoirs et connaissances qui tendent à peaufiner l’être en le rendant plus humain et plus social, en garantissant l’ordre public qui passe par une gestion saine et responsable de son ménage et par le respect de tous les principes qui contribuent au maintien de l’intégrité socio-environnementale.

Le LEEMBA a, entre autres, pour mission “MU-LEEMBIKA MUUNTU MU MBELOLO ZANDI”, c’est-à-dire, de discipliner l’être ou le MUUNTU dans tous les aspects de son existence.

Le LEEMBE doit constamment tendre en la pacification de tout son Etre, de sa vie de celle des autres et du milieu socio-environnemental dans lequel, il évolue.

A dire vrai, le mot LEEMBA, tirerait sa racine du verbe LAAMBA, lequel verbe exprime toute idée de preparation, d’adoucissement, d’entretien et ce, dans le but de rendre l’existence ou quelque chose plus agréable, plus humain voire plus social.

C’est dans cette optique que, par exemple, l’expression, “LEEMBIKA NTIMANI” traduit l’espérance de l’être  amoureux qui sur le plan affectif est, en quête d’une paix sentimentale qui ne peut être effective que, si l’être aimé s’accorde à ses désirs.

Au sein de l’ordre initiatique de Koôngo Dya Leemba, le MUUNTU aspire aux idéaux les plus humains qui soient et ceux-ci le conduisent à l’acceptation et au respect de trois lois fondamentales qui sont de dimension universelle à savoir:

1.     TSIENO WA SA-MBILA NZAMBI MPUNGU ou la loi d’adoration et de reconnaissance du Dieu créateur NZAMBI MPUNGU.
2.     TSIENO WA MBELOLO MU NZA YA MBOTE ou la loi du respect des principes de l’équilibre cosmique.
3.     TSIENO WA BELOLO ZA MAKANDA ou la loi du respect des principes de l’équilibre familial et social.


En vertu des dispositions de ces trois lois fondamentales, le LEEMBE, c’est-à-dire, l’adepte du LEEMBA croit en la justice immanente qui intervient en cas de violation du milieu socio-environnemental car elle est génératrice de Malheur.

Le Bonheur est donc pour le LEEMBE un état d’esprit, une manière d’être et de vivre qui ne se conçoit que par le respect des lois qui régissent l’Humanité telle qu’elle a été voulue, pensée par son Dieu créateur NZAMBI MPUNGU.

En somme, l’ordre initiatique de Koôngo Dya Leemba fut, chez les Koôngo un des instruments du renforcement du sentiment national et de paix en le concevant comme une sorte de jardin qu’il convenait de cultiver sans cesse. Soit l’affirmation d’un mieux-être, du vouloir vivre ensemble en privilégiant la culture et la pérennisation d’une certaine intégrité socio-humaine de l’être ou du MUUNTU. [ Rudy Mbemba-Dya-Bô-Benazo-Mbanzulu in “ Le Leemba ou l’ordre initiatique de Koôngo Dya Leemba” Société des écrivains 2015 P.16 ]
  
TAATA N’DWENGA

       Nous vous recommandons de vous procurer cet ouvrage aux éditions "La société des écrivains" ou en vous adressant à nzenga.kongo@gmail.com   
   
"Le but des écoles de mystères ou d'initiation, chez les Koongo, est le renforcement ou l'approfondissement dans la connaissance de l'être tant dans sa constitution physiologique que dans sa formation intellectuelle. Les écoles comme le kimpasi ou le Lemba aspirent à la formation de l'être intégral ou du muuntu renforcé par ce qu'il se retrouve à mi-chemin dans ses savoirs et connaissances entre le monde visible et invisible. C'est à juste titre que l'historien Dominique Ngoïe Ngala, rapporté par Jean de Dieu Nsonde définit le Leemeba comme une organisation ésotérique, institut supérieur des sciences morales et religieuses tout court: biologie, médecine, histoire,géographie,droit,astrologie,spécifiquement Koongo." (cf. Le Leemba ou l'ordre initiatique de Koôngo Dya Leemba?, p. 64). THAUKO.COM à votre service ! 














    

         

vendredi 20 octobre 2017

L'histoire de "Tête pleine-Cou baissé", supplément à la publication du 30 juin 2017


Il était une fois, je m'adressais à un groupe d'élèves de Terminal quelque part en région parisienne. Avant d'amorcer notre échange sur mon sujet d'intervention, il me vint à l'esprit de jeter un coup d’œil sur le dossier de chacun. Je aperçue qu'ils étaient tous nés en 2000. Cela m'a fait pensé à l'adulte de l'autre siècle que j'étais, car né dans les années 1960. Nous parlions de "Bioéthique", en abordant notamment la question de la souffrance hier, aujourd'hui et peut-être demain !
  Ce débat très animé m'a redirigé vers la célèbre citation de Michel Eyguem de Montaingne: "mieux vaut une tête bien faite qu'une tête bien pleine". Ainsi naquit l'histoire de "Tête pleine-Cou baissé". La génération 2.0 sait tant de choses, tellement de choses qu'elle en a la tête pleine, si pleine qu'elle lui pend sur les épaules et lui pèse sur le cou. Un coup, c'est aux SMS qu'il faut répondre en marchant dans la rue; un coup, son cou est penché vers son épaule pour bloquer son téléphone sans écouteur, pendant que ses mains sont occupées à effectuer d'autres tâches, tout en poursuivant les causeries qui ne s'arrêtent jamais, tête baissée par les sonorités de la musique, bien rythmées... "Tête pleine-Cou baissé" fait partie des mômes aux têtes étêtées qui me font penser à cette phrase apprise en classe de CP2 à Kinkala: "Toto as-tu ta tête ?" On pourrait reformuler la question autrement: Toto, où aurais-tu ta tête ?




   La tête de Toto serait probablement dans ses mains, entre ses doigts agiles qui l'aident à conquérir le monde entier, juste en appuyant des touches de son Ipad ou de son Iphone dernière génération. Meilleur des mondes que celui d'Aldou Huxley où la rupture est en marche vers l'Homme augmenté de l'horizon 2050, l'Homme de Tout et tout de suite... où la laideur, les douleurs et la souffrance n'auront plus de prise sur la personne humaine, un monde sans insectes, un monde sans les vers, car les exploits scientifiques auront tout résolu, par exemple: "voulez-vous d'un enfant et que vous ne vouliez pas en porter la grossesse ? la PMA s'en chargera ! Voulez-vous d'un enfant sans paternité ?  La GPA vous en offre la possibilité ! Les femmes trouvant les menstrues monstrueuses pourraient également s'en passer, car des contraceptifs d'appoint font l'affaire. Un truc en plus ou un truc en moins sur soi, la chirurgie esthétique ou la chirurgie de réassignation sexuelle pourrait s'en occuper ! Voulez-vous être transgenre, queer, transsexuel, etc. "yes, you can" ! Le libéralisme des mœurs n'entend plus lésiner sur les moyens et c'est sur l'Etre heureux que tout se focalise: avoir le bonheur, être heureux sans trop d'effort, baigner dans le confort. Si davantage quelque incommodité venait à contrarier votre bonheur, le SMA pourrait vous soulager; car"tous les hommes recherchent d'être heureux, cela est sans exception. Quelques différents moyens qu'ils y emploient, ils tendent tous à ce but, le bonheur. C'est le motif de toutes les actions de tous les hommes, jusqu'à ceux qui vont se pendre" (cf. Les pensées de Blaise Pascal). La quête du bonheur en serait la finalité et non le moyen, car celle-ci serait humainement universelle. Aucun humain ne prendrait donc le malin plaisir de souffrir à moins que ses vues de l'esprit aient été altérées par quelque pathologie. A tout le moins, à moins d'être masochiste. C'est le bonheur qui nous fait lever de bonne heure le matin et pourrait nous faire coucher tard la nuit, nous ayant ballotté ici et là durant la journée, à gagner la vie à la sueur de notre front. Il ne saurait y avoir de conquête plus utile que de lutter à être heureux, mais beaucoup y ont renoncé et ont choisi les chemins du bonheur commode et des plaisirs faciles, qu'il serait bientôt interdit de souffrir.
  La souffrance accompagne accompagne la vie. Autrefois, avant la péridurale, c'était dans la douleur que femme donnait la vie. Dans le monde de "Tête pleine-Cou baissé", cette douleur n'aurait plus de sens, puis que le monde a bien évolué ! La souffrance peut-elle encore avoir du sens dans un siècle où tout est fait pour que tout soit facile, sans douleur et sans effort ?
  La grande question de la bioéthique est dans l'économie de la souffrance:
        * Souffrance de ne pas pouvoir ou de ne pas vouloir procréer, la solution serait-elle de recourir à la GPA, à la FIV, à la PMA ?
        * Souffrance de la maladie face à la mort, le SMA serait-ce la solution la plus digne ?
        * Souffrances dans la vie conjugale, le divorce serait-ce la solution idéale ?
        * Souffrance d'attendre longtemps avant la récolte pour si peu, allons-y avec les OGM, les pesticides et les perturbateurs endocriniens ! (de même des études ont-elles montré le rôle des pesticides dans la diminution de la qualité du sperme humain... cf. Madia p.154).
       * Souffrance face à son être, la chirurgie esthétique vient à la rescousse pour réparer les imperfections de la nature !


       * Souffrance face à son mal de vivre sexuel, le transgenre ou la transsexualité, le queer, la chirurgie de réassignation sexuelle suffiraient pour trouver pleinement son épanouissement ! Bref. Face à la souffrance, c'est le respect, la dignité humaine, l'humilité que nous devrions revêtir surtout lorsqu'il s'agit de la souffrance des autres. Le silence compatissant et un accompagnement digne des personnes dans leur quête légitime de sérénité et de paix intérieure devraient être le début de réponse à tout; plutôt que les juger ou ne faire que dans la morale. Partager une vision critique des choses pourrait aussi contribuer à redonner des repères au monde de "Tête pleine-Cou baissé", lui rappelant le célèbre maxime de Rabelais "Science sans conscience n'est que ruine de l'âme". Tant de drames et des tragédies peuvent nous interroger à savoir si nous avons encore cette conscience efficiente assez présente aux siècles derniers ?
    La maladie est problème objectif que pose un dysfonctionnement organique en envoyant des messages symptomatiques qui se traduisent par le "mal a dit"... toute maladie suggère un processus de guérison qui n'est pas toujours perceptible et maîtrisé, d'où les soins palliatifs qui entourent l'humain avec tant de dignité.

   La notion de bonheur est relative d'où son entendement par Zénon (IVe siècle av. J.C) qui recommandait "la sagesse et la vertu comme des clés pour y parvenir. Savoir observer une certaine indifférence face aux circonstances extérieures qui influenceraient notre bonheur (non accessible par le plaisir ou le désir)".. Ce n'est donc pas en amassant des biens matériels de façon égoïste et parfois frauduleusement qu'on s'épargnerait quelque souffrance ou ainsi acquérir le bonheur.
  Il y a des choses comme ça pour ne pas faire bizarre que l'agenda de l'égalité des sexes pourrait promouvoir, la bioéconomie, par exemple ! Somme toute curieux, complexe et absurde... que des nouveautés, que d'innovations pour l'humanité mais pour quel gain pour tous ? La réponse est à observer du côté de ce qui nous vient de l'industrie alimentaire, des industries pharmaceutiques et des technologies cognitives, etc. "Tête pleine-Cou baissé" ne serait-il qu'une nouvelle race au service de la consommation déshumanisante ? Ce n'est pas lui qu'il faudrait plaindre, mais son monde qu'il partage avec les gens d'un autre siècle qui devraient soit se recycler soit entrer en résistance contre un développement dont on peut lire l'éthique sur les étiquettes !
   Notre monde est critique avec ses crises. C'est dans la fébrilité que "Tête pleine-Cou baissé" perce tous les mystères de l'univers de manière instantanée avec ses deux cerveaux (Génération 2.0) dont le coefficient multiplié par zéro laisse échapper de l'embarras, une fois déconnecté. Cette génération nourrie aux hormones avec des perturbateurs endocrinien s'éloigne progressivement des postulats existentiels que furent ceux des gens du siècle dernier dont la mémoire était stockée dans le cerveau et non dans les clés USB, les périphériques de toutes sortes.
  Notre humanité survivra t-elle de la croissance économique exponentielle tant  clamé par les Etats ? "Produire pour consommer ou consommer pour produire, là semble résider la nouvelle question existentielle que notre temps ait adoptée" (cf. Laetitia Pouliquien in  Femme 2.0 p.39, Saint-Léger Editions). THAUKO.COM à votre service !

samedi 14 octobre 2017

Pensée du week-end du 14 au 15 octobre 2017 : La fécondité de la souffrance

De Marthe Robin: "La souffrance prend la valeur de celui qui la porte. Ne souffrons pas pour rien."

vendredi 13 octobre 2017

Une vision kuéiste du "NDU", décryptage de Taata NDWENGA

NKAADI ET LA NOTION DE NDU OU KU-NDU CHEZ LES KOÔNGO


Dans le cadre de sa toute dernière et remarquable contribution à la connaissance des valeurs fondamentales et culturelles du peuple Koôngo et portant sur NKAADI De l’économie circulaire, Theodulos Auguste KOUNKOU KUE traite, entre autres, de NDU ou KU-NDU, qu’il perçoit, de la manière la plus large qui soit. De la réflexion du philosophe muntuïste sur cet épineux concept, il apparaît que celui-ci est, à la fois, NORME et FORCE qui régissent l’Etre ou le MUU-NTU dans toute sa globalité.

A titre de rappel, le NDU ou KU-NDU est l’ensemble des savoirs et connaissances qui permettent à l’être humain d’être en parfaite harmonie avec les principes et lois qui régissent l’univers et lesquels, par le respect qu’il leur doit, concourent fondamentalement et durablement à son bien être.

         LE NDU est, peut-on dire, NORME, d’après l’analyse de KOUNKOU KUE, parce qu’il se présente, de façon remarquable à ses yeux comme “ une science suprême qui s’acquièrt par une vie harmonieuse avec les “Présents-Absents” en correlation avec les “mi ndjoka-nzila” ( les passagers d’ici-bas), par l’application rigoureuse des “mi kieno ou mi nsieno” ( l’objet qui vous appartient mais qui est en même temps régis par des lois cosmiques).[ NKAADI P.79.] Cette science ne saurait, ajoute l’auteur avec perspicacité, être l’apanage ni d’une ethnie ni d’un clan, car nous retrouvons NDU dans d’autres sphères de la diaspora bantoue, telle que chez les Swahili qui désignent les personnes chères par “Wa ndugu wa penzi”, etc. Si nous effectuons davantage de recherches, nous nous apercevrions, poursuit l’auteur, de l’immensité de ce mystère “mpi ndu za néné”. A tout le moins, chaque clan fut disposé dans la cosmogonie koongo à s’approprier d’un pan du grand mystère de l’Etre, en vue de l’harmonie de l’ensemble du groupe.

         Par ailleurs, NDU est FORCE, chez le penseur muntuïste KOUNKOU KUE, parce qu’il n’est ni esprit ni divinité que l’on pourrait invoquer ou implorer ni adorer. Selon l’auteur NDU est force vitale émanant de la symbiose trilatérale: Nkaaka-Nkieno-Nzambi, traversant l’humanité du muuntu (mbelolo za kuezama). NDU est, conclut-il, énergie transformatrice qui proviendrait de la source mère de vie “Maama Ntoto” au contact de l’arc-en-ciel (lukoongolo) qui provient lui-même de Koongo (l’astre éternel). NDU est circulation d’énergie entre différents paramètres en harmonie perpétuelle pour le biorythme existentiel. [ NKAADI. P.80.]



Le NDU ou KU-NDU est, somme toute, un croisement, chez l’Etre ou MUU-NTU de deux principes de vie à savoir: LA NORME SOCIO-HUMAINE et LA FORCE VITALE qui, au final contribuent au respect et surtout à l’intégrité ou l’épanouissement existentiel et global de sa personne.

Ici, KOUNKOU KUE met l’accent sur la traduction du symbole de la croix telle qu’elle est définie selon les croyances Koôngo et ce, bien avant l’introduction du christianisme en 1488 sur le sol Koôngo par les Portugais. La ligne verticale correspondant à la FORCE VITALE et la ligne horizontale à celle de la NORME SOCIO-HUMAINE.


TAATA N’DWENGA


jeudi 12 octobre 2017

L'éducation (Lusantsu na ndongosolo)

Un thème qui passionnait tant le vénérable Cardinal Emile Biayenda dont nous commérant le 40e anniversaire de son "entrée dans la vie", comme l'aurait dit Thérèse de Lisieux. Oui, l'éducation fut la pierre de faîte du ministère épiscopal du "Mpfumu Nganga, notre Mukukuniungu, Taata Emile Biayenda qui y déploya toute une pédagogie, pour prévenir la jeunesse des dérives du futur tout en instruisant les anciens de savoir préserver l'essentiel des fondamentaux qui construisent et solidifient la vie humaine, dans nos sociétés Bantu.
  Le terme éducation est noble de sens aussi bien dans la langue de Voltaire que celle de "bisi Koongo". Parler de l'éducation c'est recourir à faire grandir, à encadrer, à accompagner sur le chemin de la croissance physique, spirituelle et intellectuelle. Eduquer c'est aussi faire grandir en humanité, faire sortir d'un cadre inapproprié pour un univers cohérent, celui des valeurs...
  Dans le "ndinga koongo-sundi-ladi", l'éducation est perçue comme un long processus d'humanisation, tel que l'indique les mots: " Lusantsu na ndogosolo".
  * Lusantsu vient du vocable "Saantsa". Si nous pouvions nous permettre un peu d'exégèse sur ce mot, nous lui découvririons le préfixe "sa" qui sous entend en langues koongo-sundi-ladi, le fait de faire, d'ajouter à... le suffixe "ntsa" indique le goût acidulé, un goût très prononcé qui nécessiterait soit un peu de sucre soit un peu de sel ou un peu de piment pour le relever ! Cette analogie au mot "saantsa" nous révèle le processus complexe de l'éducation qui consiste non seulement à donner a manger à l'enfant, à le vêtir, mais aussi et surtout à préparer en l'enfant d'aujourd'hui, l'adulte de demain. Ce qui ramène dans le simple fait de la croissance biologique, les ingrédients de la croissance morale, par le biais de la culture et aussi la croissance spirituelle; afin d'unifier l'Homme intégral (corps-âme-esprit). "Saantsa", c'est aussi couvrir de bienveillance et de sollicitude, la personne qui serait en état de nécessité ou de besoins telle qu'une mère qui venait d'accoucher ou à l'approche d'un accouchement. "Ma kibuti" devait se faire accompagner et toujours être assistée par une "ndezi". Celle-ci prenait en charge les petits soins de la mère et de son bébé, jusqu'à ce qu'elle recouvre suffisamment d'énergie pour renouer avec ses tâches ménagères habituelles. En langues "koongo-sundi-ladi", cela se disait "moyo wa tsidi wa muasi". La coutume considérait qu'une femme ayant accouchée portait en elle le grand vide que le bébé venait de laisser dans ses entrailles. Pour cela, une aide (ndezi) lui était nécessaire pour des bains rituels, lui préparer ses repas, l'aider à prendre soin de son bébé, pour lui permettre de récupérer des suites de la fatigue de l'accouchement et de son sommeil perturbé par les pleurs ou les veilles nocturnes du bébé...Bref. Tout en prenant soin du nouveau né, la communauté (la famille) prenait également soin de l'enfant jusqu'au rite de "dukisa mwana", le second rite de passage de "mwana mukoongo", une sorte de présentation officielle du bébé à toute la communauté qui devait accueillir un nouveau membre en son sein, rendant public le ou les noms que celui-ci portera désormais. C'est toute la communauté qui devra désormais veiller à l'éducation de cet enfant. Chacun dans son "kibelo" (quartier résidentiel) se sentira concerné (toute la communauté "saantsa"mwana).
* Ndongosolo (Initiation), la transmission des enseignement ou des apprentissages; des acteurs spécifiques vont devoir intervenir dans l'accompagnement pédagogique de l'enfant, outre les apprentissages et l'initiation de base qui font partie des us et coutumes quotidiennes assumés en famille. Le terme Ndongosolo est chargé de symboles, car il englobe les verbes "longesa" "luengesa": longesa qui signifie enseigner ou transmettre, le verbe " luengesa" veut dire  prévenir ou instruire, tandis que "longa" qui surgit du même groupe de mots signifie conseiller et enfin le terme "longo" (alliance). Ces trois déclinaisons qui jaillissent de la même source illustrent la noblesse de ce métier, de cet art d'éduquer, car en éduquant , on enseigne. Dans l'enseignement, il y a la transmission des connaissances qui se fait à travers la voie de "Ndo" (l'émission des ondes), comme nous l'indique l’éminent koongologue dans son remarquable ouvrage hommage au vénérable Cardinal Biayenda, pp. 158-160, en son annexe 11. En éduquant, on prévient et en instruit également, on oriente aussi par la voie des conseils (maloongi). "Maloongi" constituaient le premier système préventif de la pédagogie koongo, illustré à titre d'exemple, par le proverbe:"longa mwana wu tama kuenda ku zaandu, ka ku longandi wo vutukidi ko" (savoir anticiper sur les imprévus; il serait plus judicieux de conseiller un enfant qui va au marché, par rapport à sa ligne de conduite sur ce lieu, que de couvrir des reproches, celui qui en revient; ce sera bien trop tard !). L'éducation c'est aussi jouer au jeu de "l'alliance" entre l'émetteur et le récepteur: l'adulte est sensé être l'émetteur et l'enfant le récepteur; quoi que de nos jours, cette équation rencontre tant d'impondérables, tant d'inconnues...pour que la transmission se fasse dans de bonnes conditions, l'enfant ou le jeune doit adhérer à la vision de l'adulte qui lui montre le chemin de son devenir. 
Ainsi "Lusantsu na ndogosolo" disent mieux l'approche de l'éducation chez les koongo, car celle-ci avait pour école : Mboongi. Le vénérable cardinal Emile Biayenda écrivait ceci à ce sujet: " C'est au mboongi que l'enfant recevait conseils et avis. Tous, vous en avez le souvenir, quelquefois nostalgique, de cette ambiance extraordinaire qui régnait au mbongui. Depuis notre plus petite enfance, nous restons marqués par ce que nous avons appris, découvert, vu, écouté au mbongui où nos parents se rassemblaient et où arrivaient et étaient discutées toutes les nouvelles de la famille, de la ville et même du monde. Le mbongui c'était "l'âme" du village et c'est au mbongui que l'enfant recevait la plus grande part de son éducation" (cf. Cardinal Emile Biayenda, lettre pastorale de carême 1974, sur l'éducation des enfants). Les jeunes filles et les garçons de moins de 9 ans continuaient à recevoir leur formation humaine, autour des trois "bikuku" de la cuisine où la maman initiait ses jeunes enfants aux bonnes manières, à l'éducation de base reçue au foyer parental.
Les méandres de la modernité ont changé la donne de cette approche éducative traditionnelle , pour faire place à l'impasse du jeu de rôle inversé où ce sont les enfants qui font les parents ! La lucidité du bon pasteur attribuait de son temps cette crise de l'éducation à la disparition du mbongui. Il poursuivait: "L a disparition du mbongui me semble être une des causes les plus importantes de ces difficultés rencontrées pour éduquer nos enfants. Il y en a d'autres: psychologiques, économiques ou sociales. Je ne chercherai pas à les passer toutes en revues, je veux simplement en faire ressortir quelques unes qui nous aideront à faire la lumière et à mieux comprendre" (cf. Idem). Cette lettre pastorale mettait en évidence les fragilités de la société Congolaise des années 60-70. Hélas ! La situation s'est détériorée davantage depuis ce temps, avec les crises politiques qui ne cessent de générer des violences armées, l'errance des familles, la déscolarisation des enfants, le désœuvrement ourdi de la jeunesse, la délinquance sénile et juvénile constante...
Nos constats n'y feront rien. Il reste désormais à refonder une nation sur des valeurs sûres où l'exemplarité des aînés redressera les chemins tordues des cadets. Les simples bonnes intentions et les bons discours n'y feront rien non plus. Il nous faudrait beaucoup de lucidité pour cerner les causes de cette décadence morale collective et en discerner d'éventuelles issues de sortie, à une époque des vertigineuses mutations sociales, culturelles, politiques et économiques où , même les nations les mieux organisées battent de l'aile ! La profonde crise anthropologique que traverse notre siècle n'épargne rien non plus. La nature de la famille subissant de plein fouet des évolutions contestables liées aux questions bioéthiques comme la G.P.A, la P.M.A, le S.M.A, la bioéconomie et compagnies ne doivent point nous laisser planer uniquement vers une nostalgie d'un passé familial où les parents et par extension la famille avait pour ainsi dire, le monopole de l'éducation de leurs enfants. Tant d'intrus font irruption dans l'univers de l'enfance et de la famille que seule une société solidement aguerrie pourrait juguler les impondérables qui menacent les équilibres dont l'éducation de base de l'enfant. Les nouvelles technologies d'information et de la communication (NTIC) viennent bouleverser et changer radicalement les modes traditionnels de transmission et de facto les us et coutumes de nos sociétés traditionnelles. Nous alarmer, nous lamenter et gémir sur un passé aussi glorieux fut-il ne refera point les choses telles que nous les avions connu et y avions vécu. Il nous faudrait de l'ingéniosité et de la souplesse de l'esprit pour savoir composer avec l'altérité afin de vivre de l'essentiel de nos fondamentaux (kikulu) au milieu des vicissitudes d'un monde en contraction vers un accouchement difficile !
Communication et transmission
Dans les années 70 du siècle dernier, le pasteur de l'église catholique du Congo tirait déjà la sonnette d'alarme sur la bonne gestion ou le savoir vivre intelligible avec les moyens de communication du monde à venir dans lequel nous sommes déjà. Il écrivait: " Avec cette évolution du monde, rapide, extraordinaire, se développent des faits nouveaux: les moyens de communication, par exemple, qui font prendre conscience à l'homme de sa dimension universelle; les possibilités inouïes révélées par la conquête de la lune. Toutefois, ces faits nouveaux demandent à l'homme de s'asseoir et de réfléchir, car ils comportent un danger, un risque dont nous devons mieux prendre conscience pour pouvoir le dominer. Parmi tous ces faits nouveaux, il en est un qui s'impose à nous, Congolais, avec force et netteté: celui de l'éducation des enfants et des jeunes." (cf. Lettre pastorale du cardinal Emile Biayenda, carême 1974). La connexion aux réseaux sociaux déconnecte la famille en son sein pour le monde extérieur lointain. Avec ce paradoxe, que de liens réels escamotés au profit des liens virtuels, érigeant des murs de solitude et d'isolation des parents aux enfants de la génération 2.0, voir même au sein des couples où la parole conjugale est arrachée par des inconnus(es) qui font irruption à tout moment dans ce qui fut l'intimité conjugale...parole perdue-cohésion fracturée et intrusion des loups dans la bergerie ! C'est la parole qui rassemble (zonzeka = zonza, nzonzolo...). Lorsque la parole perd de sa verve, son verbe s'anéantie  et l'harmonie se rompt. C'est le manque de respect à la parole et à la parole donnée qui engendre toute crise institutionnelle et la famille ne saurait y échapper. Le mbongi était ce lieu de la parole partagée, celle qui édifiait les anciens et éclairait les les plus jeunes. Quelle éducation pourrions-nous promouvoir, lorsque la parole perd de sa noblesse ? Lorsque les réseaux sociaux qui devaient nous relier aux "lointains" deviennent les bourreaux de la parole, la pomme de discorde qui place chacun devant son univers de connection aux ramifications multiples: snapchat, wattsap, facebook, instagramm, sarahah, tweeter, etc. Si nous avions l'esprit alerte, nous ferions mieux de transformer ces réseaux sociaux en mbongi, désormais relié avec les lointains, dans une communion de partage...Bref. La crise de l'éducation passe aussi désormais par la communication pour transmettre.
Le système éducatif et ses écoles parallèles
Nous perdrions notre temps à répertorier les dysfonctionnements d'un système éducatif tant décrié de tous avec ses écoles parallèles. Les dispositifs post conflits n'ayant jamais fonctionné depuis les années 94 à nos jours; il serait plus judicieux d'être une force de proposition parmi tant d'autres que nous nous érigions en accusateurs béats.
Rien ne peut prendre corps convenablement dans un pays en perpétuelles tensions depuis des décennies. Des générations se succèdent dans les mêmes marasmes qu'il serait vain de proposer des solutions "miracles" pour redresser le système éducatif congolais tant que les crises politiques au plus haut sommet de l'état ne connaissent pas de dénouement définitif. A tout le moins, pour sauver l'essentiel, des états généraux de l'éducation nationale s'imposent, afin de restaurer tout le système éducatif en panne depuis bien longtemps, en commençant par un état des lieux région par région, car le Congo a pris énormément du retard sur le monde et même dans la sous région... nous allons droit vers la submersion totale, plutôt que vers l’émergence tant clamée. Ce serait avec les mots du vénérable Cardinal Emile Biayenda que nous conclurons cet article, tout en vous redirigeant vers d'autres publications plus anciennes de ce blog. Aussi, nous vous recommandons trois précieux ouvrages de Kounkoun kue Theodulos Auguste, pour creuser davantage notre réflexion et envisager l'avenir autrement: Tsikulu (G-10-Oui) - Matalana  - Kintuadi Mayela (Disponible en prenant contact sur nzenga.kongo@gmail.com). La situation étant préoccupante, laissons-nous de nouveau interpeller par la gravité de ces paroles: "Pouvons-nous faire quelque chose... ? C'est la question que la plupart d'entre vous se posent avec une certaine angoisse. Permettez-moi d'y répondre avec force, avec autorité, il y a quelque chose à faire tout de suite ! Celui qui ne se met pas tout de suite au travail, celui-là n'est pas un vrai congolais, celui-là n'est pas un fils de l'Eglise. Cela il faut le dire, il faut le répéter à temps et à contre temps, il faut le dire dans tous les lieux où vous vous réunissez. Je manquerais à mon devoir si je ne vous parlais pas ainsi avec fermeté: il y a quelque chose à faire. Dieu nous a donné une intelligence; nos ancêtres nous ont légué une sagesse que beaucoup nous envient. Asseyons-nous un moment, un long moment, asseyons-nous en famille, asseyons-nous en paroisse; asseyons-nous et commençons par faire la lumière et réfléchir." (Cardinal Emile Biayenda, lettre pastorale Carême 1974). E nkansukulu ...
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jeudi 5 octobre 2017

Le travail, un droit existentiel fondamental

L'Homme est un être travaillé qui doit travailler, pour vivre: "bisogna lavorare per vivere". Rien de ce qui est ne l'aurait été sans le travail. A observer ce que nous voyons, nous pouvons définir le travail comme une mise en mouvement (Eksister = être en dehors de l'assis, exister !) d'un être pour transformer, créer ou produire un effet sur l'existant, qu'il relève du règne végétal, du règne animal ou d'une quelconque autre nature. Tout ce qui s'émeut et susceptible de transmettre des émotions fourni également du travail, car son action aura de l'impacte sur autrui et  capable de contribuer à l'édification commune.
  Le travail n'est pas seulement une activité exercée à but lucratif. Il permet à l'être de se mouvoir, de s'épanouir. En agissant, l'Homme se retrouve pleinement dans son élément de co-créateur et peu importe la nature ou l'importance de ce qu'il exerce, de ce qu'il accompli. Priver un être humain de se réaliser par le travail serait tuer en lui son génie, sa capacité de produire pour le bien-être commun. De ce fait, un membre de la communauté qui ne pourrait contribuer ni par sa créativité ni par sa participation à la production d'un bien ou d'un service ne saurait honorer la société qui l'abrite. Nous savons cependant que tous ceux qui désirent contribuer à l’essor de leur communauté n'ont pas toujours le bon sort pour qu'ils s'en sortent. C'est là que devrait intervenir la communauté ou la collectivité locale et par extension d'autres communautés (par solidarité), afin que chaque individu s'épanouisse de par son travail, car" il n'y a pas de travail insignifiant" disait Martin Luther-King qui poursuivait son discours à l'endroit des jeunes:"Tout travail qui aide l'humanité a de la dignité et de l'importance" (cf. Sois le meilleur quoi que tu sois: la force d'aimer).
  Le travail est le moyen de libération par excellence. Il assure l'indépendance (une certaine autonomie pour faire face à ses besoins, mais aussi pour participer à résoudre les questions financières qui peuvent se poser dans la famille, etc.). Le travail procure la dignité  et de la notoriété au sein de la société, il donne de l'avoir et du pouvoir pour se faire valoir. Il vous distingue de ceux qui n'en ont pas et qui ne peuvent en vivre. Plusieurs expressions koongo le mettent en évidence, comme: "Mpuku bola , simbila ku mutsila ou ntsombé ya tsubuka"...
   Dans la société traditionnelle, chacun pouvait valoriser ses acquis, grâce à un apprentissage quasi naturel, puisque dans la formation humaine du "mbongi pele ko ku hata" était intégré les rites d'acquisition d'un métier ou l'exercice à la création d'objets de toutes sortes. Ces objets étaient toujours valorés, car "mwana fioti ka lambila mu kimenga, lumbu lamba ka lamba" (Un enfant qui prenait plaisir à imiter le travail des adultes finirait par devenir un bon praticien !). A ce sujet, le vénérable Cardinal Emile Biayenda écrivait ceci dans sa thèse: "Il n' y a aucun doute, le travail n'est pas étranger, ni une chose nouvelle dans la société africaine. Mais comment se faisait l'apprentissage ? C'est dès son jeune âge que l'enfant commence à s'initier aux travaux agricoles, aux diverses techniques en usage chez les hommes de la tribu: Tressage des nattes, construction des cases, tissage, pêche et chasse, etc... le garçon s'instruit auprès des adultes et des vieux, tandis que la mère prend en main la formation pratique de ses filles. Ainsi les jeunes exercés à l'endurance, au courage et au dévouement faisaient leur entrée dans le cercle de ceux qui connaissaient" (adultes), sans aucun complexe (cf. Emile Biayenda in coutumes et développement chez les Bakongo du Congo-Brazzaville "Thèse facultés Catholiques Lyon 1968, deuxième partie, page 4), cité par Rudy Mbemba-Dya-Bô-Benazo-Mbanzulu, dans son ouvrage intitulé "Le Cardinal Emile Biayenda et les douzes clefs de la conscience socioculturelle des (ba)koôgo, p.21, éd. ICES 2017.
    Dans les sociétés modernes où le veau d'or trône au dessus de nos cités et où la gratuité devient une valeur désuète, tout est devenu affaire de rentabilité ( NKAADI ), de plus value. Tout savoir faire est vendable et monnayable. Les acquis qui servaient jadis à étoffer ou à consolider les liens sociaux n'ont pas échappés à la logique du marché. La tresse des cheveux, garder les enfants de la voisine pour quelques instants, visiter régulièrement une personne âgées et lui apporter assistance...plus rien n'est laissé sur le chemin de la charité.
   En dépit de la multiplication et de la conversion de tout ce qui fut autrefois passerelles des liens sociaux en produit commerciaux, le marché du travail demeure toujours défaillant et ne parvient pas à éradiquer le chômage des jeunes plus particulièrement.
    L'infection du travail par la corruption 
Aux pays de ceux qui s'enrichissent sur le dos des "pauvres", la courbe du chômage est loin de s'inverser pour le plein emploi. Chez ceux qui font tout pour demeurer dans la misère, le nombre de chômeurs n'existe même pas, car il n'y a ni enquête ni statistiques, tant la question ne semble préoccuper personne. Ici, on ne parle de travail que pour octroyer des emplois fictifs aux défunts ou aux proches parents qui n'ont jamais effectué une quelconque prestation pour les services publics.
 "A quoi bon travailler, si ce dont on a besoin on peut l'obtenir par des pots de vin ou des passe-droit ?" La corruption devient la règle et assurer loyalement un travail devient une exception. On a tué le travail, le travail est mort. Celles et ceux qui osent l'accomplir dignement semblent faire l'objet d'appartenir à une autre race d'individus. L'Etat est ruiné faute de conscience professionnelle.  Disant simplement que la crise est déjà et d'abord dans la tête, avant qu'elle n'immigre dans la poche ou dans le porte monnaie. Quand il n' y a plus de travail, il ne pourrait y en avoir pour les générations futures, "alors on danse !" Comme l'aurait chanté quelqu'un. On boit, on danse, on s’enivre et on fornique( si ce n'est "fort-niquer" !). Le désespoir s'empare des âmes et la confusion dans les esprits; chacun attend son "ngiri", sa part de pactole immérité, pour tenter de se faire son bonheur., exhiber ses richesses (Matalana).
   Ceux qui voulaient se créer leurs petits boulots sont racketté ou alors  ils passent à la moulinette de la corruption, à travers toutes ces tracasseries administratives qui les découragent avant qu'ils n'entreprennent quoi que ce soit. Finalement, il paraît mieux de ne rien oser faire et attendre passivement que l'argent entre dans la poche ! Le travail devient l'ennemi des farnientés ou de tous ceux qui spolient les autres. Certains se sont forgé des facéties pour s'enrichir à la bonne franquette et voilà la Bonne Nouvelle !
   L'avilissement de l'Homme est à son comble, lorsque celui-ci vit désormais dans l'assistanat permanent. Ce sont, hélas ! Ceux qui ploient sous le fardeau de l'immigration, depuis leur exile  qui deviennent (les mpuda =PMU= chevaux de course) les pourvoyeurs providentiels de ceux qui sont "mutilés"par leurs gouvernements qui n'ont pas de politique efficiente d'emplois.
    Travail éthique et dignité humaine 

L'humanité n'aurait peut-être pas connu le marxisme léninisme si ceux qui détenaient les capitaux faisaient travailler dignement les couches populaires, autrement dit les masses prolétariennes. D'où la cristallisation de la haine du communisme face au capitalisme et vice-versa. L'aliénation dans le travail auquel s'insurgeait Karl Marx s'appuyait avec raison sur ce manque d'éthique qui transformait le travailleur, l'ouvrier en simple marchandise du capital: "les damnés de la terre, les forçats de la faim..." malheureusement, les choses n'ont pas beaucoup changé depuis le moyen-âge jusqu'à nos jours; le progrès scientifique et technologique n'a pas redonner plus de dignité à l'Homme créateur de toutes les richesses possibles. Il faudra continuer à se battre encore pour l'instauration de plus de justice sociale dans ce monde. Œuvrer pour la sacralité de la propriété individuelle dans un esprit de partage. Veiller au respect du bien d'autrui et du bien commun. Savoir encourager ceux qui entreprennent à la sueur de leur front, sans leur mettre les peaux de bananes sous les pieds.


   Le travail et son fruit furent sacrés dans la tradition Koongo, comme l'illustre ces proverbes: " Wa ba mumpala, zaba salu: bu nuna, ni kio diila (le métier appris dans ta jeunesse te nourrira dans ta vieillesse) - kisadi ni ki die (ne doit manger que celui qui travaille), l'ouvrier a droit a son salaire. Kimvuama ka ba handa kio ko, mu sala ba sala kio (c'est le travail qui donne accès aux richesses et non l'initiation rituelle) - Bia sala mooko mu teo lulendo, bia laba bunsana bi hana (la fierté récompense le travail ; le voleur ne trouvera que chagrin et souffrance) - Ku dia bukundi, ku sala masembo (plein de gentillesse à table et de récrimination au travail)" cf. Emile Biayenda, Thèse annexes p.71). Par cette citation, l'éminent koongologue Rudy Mbemba-Dya-Bô-Benazo-Mbanzulu nous éclaire de nouveau à travers son remarquable ouvrage dédié au 40e anniversaire de la mort du Cardinal Biayenda, p.125, déjà cité ci-dessus: " Le travail fait l'honneur de l'Homme: il lui permet de prendre sa place dans la communauté et de contribuer à l'accroissement du patrimoine familial... le travail n'avait pour but ni le rendement, ni le profit, moins encore la rémunération: il était d'abord et avant tout le moyen qui assurait la subsistance du groupe classique en vue de la continuité de la lignée et de la satisfaction de la vitalité corporelle et morale".
   Priver de salaire quelqu'un qui a accompli son devoir de travail est une atteinte flagrante à l'humanité de l'Homme. C'est un crime odieux. C'est pour cela qu'il existe des syndicats pour défendre les droits des travailleurs, les prud’hommes  et tant d'autres institutions à travers le monde, pour exalter les droits des travailleurs. Il y en a même une qu'on appelle: Bureau International du Travail ( BIT ).
   Le travail est sacré et celui qui l'accompli est à l'image de Dieu créateur. THAUKO.COM à votre service !